First Cow, l’Amérique rhabillée en Nouveau Monde, le vrai
Le nouveau film de Kelly Reichardt est à l’affiche pour quelques séances encore au cinéma Le Cratère à Toulouse.
Sur le thème de la conquête de l’Ouest , voici un film qui prend le contrepied absolu des mythes fondateurs de l’Amérique tels que gravés par Hollywood. Jusque dans la manière dont cette industrie s’est accaparé le concept bucolique de fusion de l’Homme et du « monde sauvage ». Convenons que ce mode de récit a façonné notre perception de spectateurs éloignés.
Avec First Cow , Kelly Reichardt offre d’entrée les clés d’un authentique « nouveau » monde cinématographique.
Sa narration, le focus choisi au cœur d’une scène qui en offre plein d’autres, ses cadrages intimes ne prennent même pas la peine de déconstruire les clichés du genre : elle les ignore tout simplement; elle zappe tous les codes scénaristiques du suspense et de sa résolution. Sous sa plume, les points d’appui de notre cerveau conditionné se dérobent pour laisser toute la place à une lecture poétique de l’ Histoire pourtant unique de la naissance de l’Amérique. Il nous faudra du temps – et le tempo de ses travellings immersifs nous l’offre sans doute – pour laisser affleurer en nous cette interface organique qui fait rentrer dans le film avec beaucoup de subtilité.
L’élégance infinie de son écriture n’est pas sans rappeler celle du grand Terence Malik. William Tyler signe sur quelques thèmes un habillage de mélodies épurées, juste parfait.
Ce billet n’en dira pas plus sur l’intrigue ou le fin mot de l’histoire: ni l’un ni l’autre n’expliquent l’enthousiasme que vous lisez ici. Mais si vous êtes adepte du full contact, ce film est pour vous!
Pour les autres, ne manquez pas ce bain de jouvence du récit cinématographique.
Comme on goûte un véritable clafoutis hors-saison.
Il y a beaucoup à dire – et à lire – sur la filmographie hors-piste de Kelly Reichardt, à qui le cinéma Le Cratère (Toulouse intra muros) consacre une partie de sa programmation avec les films.