Ce film passionnant et haletant de Dragan Bjelogrlic nous raconte une histoire fort méconnue se déroulant durant la Guerre froide, une histoire qui va réunir deux scientifiques aux buts opposés, l’un travaille à sauver, l’autre cherche à tuer.
Octobre 1958, sur le tarmac parisien d’Orly, se pose un avion en provenance de Belgrade. A son bord quatre scientifiques. Dans le plus grand secret ils travaillaient, au Centre de Vinca, à mettre au point une bombe nucléaire yougoslave, sorte de sécurité absolue face… à l’URSS. Le professeur Dragoslav Popovic, patron de l’équipe, pousse au-delà du raisonnable les expériences. Ils sont tous irradiés.
Direction immédiate vers le centre de soin de l’Hôpital Curie à Paris.
Là, ils sont pris en charge par le professeur Georges Mathé (1922-2010), aidé du docteur Léon Schwarzenberg (1923-2003). Ces deux médecins travaillent depuis un certain temps sur la greffe de moelle osseuse dans le cas de patients irradiés. Pour l’heure, les expériences sur les souris n’ont rien donné. Mais voilà, les quatre jeunes chercheurs yougoslaves sont, soit condamnés à court terme si rien n’est tenté, soit vont devenir de véritables cobayes humains.
Et alors avoir une chance de survie.
La greffe de moelle osseuse en est à ses balbutiements et les risques sont aussi du côté des donneurs… Malgré tout, Georges Mathé trouve ces derniers et va tenter ce qui deviendra l’une des plus grandes avancées du XXe siècle dans la lutte contre le cancer. C’est dans le huis clos de l’hôpital et celui du centre de recherche atomique yougoslave que se déroule ce film d’une structure très classique mais terriblement efficace, émouvant et angoissant. Un vrai suspense dans lequel se disputent la recherche pour sauver les Hommes et l’autre visant à le détruire.
Autant vous prévenir, rien ne nous épargné des soins pratiqués. Mais pour aussi cru et sans romanesque aucun que soit ce film, il n’en est pas moins un véritable plaidoyer pour une Humanité un bref instant (décisif) retrouvée. Le célèbre caractère bien trempé et austère du vrai Georges Mathé est ici admirablement incarné par Alexis Manenti, un acteur qui monte en gamme de manière impressionnante.
À ses côtés, Jérémie Laheurte (Léon Schwarzenberg) et Lionel Abelanski (Docteur Jame) complètent une distribution serbe d’un très haut niveau, dont Radivoje Bukvic (Dragoslav Popovic, troublant d’ambiguïté).
Ce serait vraiment dommage de passer à côté d’un film traçant le portrait d’hommes qui ont su dépasser les dogmes politiques et scientifiques pour incarner ce que l’humain a de meilleur en lui.