Merveilleux écrivain ayant déployé son talent aussi bien dans le roman, la nouvelle, l’essai ou le récit, François Bott (1935-2022) fut un auteur non pas clandestin, mais sous-estimé.
Celui qui fonda Le Magazine littéraire et dirigea longtemps Le Monde des livres a signé une foule de petites merveilles comme, par exemple, Le genre féminin publié en 2007. Si les « femmes mythologiques, les quotidiennes, les femmes fatales, les femmes miséricordieuses, les femmes charmantes, les femmes charmeuses, les femmes de pouvoir et les dames de cœur » occupent une large place ici, les hommes ne sont pas oubliés. A travers des nouvelles composant une sorte de roman, Le genre féminin met en scène des personnages et des destins se mêlant d’un récit à l’autre.
La plupart des créatures de François Bott vivent en compagnie des livres et des héros de romans, entre œuvres de chevet et admirations littéraires qui se transforment en histoires de famille. De Paris à Buenos-Aires en passant par Buenos-Aires, Trouville, Juan-les-Pins ou Tinos en Grèce, ils se croisent, se cherchent, sont amants, se quittent, se retrouvent…
Faire comme si
Des lieux aux êtres, il n’y a qu’un pas. Les secrets d’une vie ne résident-ils pas d’abord dans une géographie sentimentale qui « réunit les villes, les paysages, les bords de mer, les quais de gare, les aéroports, les stations de métro, les arrêts d’autobus, les bistrots et les bars où s’est décidée, s’est assombrie, s’est éclairée notre existence. Les lieux des ravissements ou des grands chagrins, des ruptures ou des recommencements. » Le genre féminin nous fait entrevoir les paysages de l’âme humaine, l’éblouissement de l’amour, les rêves de jeunesse « faits pour vous inspirer des regrets et vous déprimer », le souvenir du paradis perdu, au gré de scènes tour à tour primesautières et mélancoliques.
L’écrivain a l’élégance d’évoquer les tragédies sans s’appesantir, en levant délicatement un coin de voile pour le rabattre aussitôt. « Tout le monde fait comme si depuis toujours. Comme si la vie, comme si les étés, comme si les amours ne devaient pas se terminer », écrit-il en saisissant précisément les derniers instants de lumière comme cet été qui fait ses adieux au son de September song et Some of these days. François Bott épingle avec grâce des sourires fugaces et des profils perdus que l’on n’oublie pas.
Le genre féminin – Editions des Equateurs