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Reality, un film de Tina Satter

by Anthony del Puerto

Pour son premier long, la réalisatrice américaine Tina Satter se lance, avec succès, dans le huis clos étouffant d’un interrogatoire du FBI dont la « victime » est une lanceuse d’alerte, Reality Winner.  Une histoire vraie !

Sydney Sweeney (Reality Winner) – Crédit : Mickey et Mina LLC

De 2010 à 2016, Reality Winner travaille à l’US Air Force en tant que cryptologue. Cette linguiste parle trois dialectes indo-iraniens et c’est à ce titre qu’elle est embauchée par une entreprise prestataire de services au profit de la NSA (National Security Agency). Le 13 février 2017 elle est affectée sur la base militaire d’Augusta en Georgie. C’est là qu’elle sera arrêtée par le FBI le 3 juin 2017 à la suite d’un hallucinant interrogatoire mené par les agents Garrick et Taylor. Cet interrogatoire ayant été enregistré, il forme l’essentiel des dialogues de ce film.  Que s’était-il donc passé ? Bien que niant la totalité des accusations dont elle était l’objet pendant la première partie de la confrontation, finalement Reality Winner avoua avoir transmis à un organe de presse : The Intercept, un rapport secret mettant en cause la Russie dans l’élection du Président Donald Trump en 2016. En demandant à la NSA de confirmer ces informations, The Intercept, par inadvertance, a « grillé » sa source par définition anonyme. Le 23 août 2018, Reality Winner est condamnée à 63 mois de prison.  Le film aujourd’hui en salle est uniquement centré sur l’interrogatoire. Et ce qu’il y a de plus fascinant dans celui-ci, c’est le mode opératoire, un mode régit par des techniques verbales incluant autant les mots que les accents, l’émotion, le stress, les sous-entendus, la fausse bienveillance, la menace, en permanence rappelée. Il se déroule dans une pièce sans meuble ni fenêtre de la petite maison de Reality, un huis clos anxiogène dont les agents du FBI vont faire le théâtre de méthodes d’une fulgurante efficacité. Reality a alors 26 ans et ne tiendra pas longtemps face à ces deux machines de guerre. Même si ces derniers sont admirablement interprétés par Josh Hamilton et Marchant Davis, le film repose cependant sur l’incarnation stupéfiante de Sydney Sweeney, Reality prise dans les rets d’un système parfaitement codifié.

Un véritable docu-fiction d’une redoutable maîtrise.

Robert Pénavayre

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