Estragon, Vladimir, Pozzo, Lucky, leur temps et leur espace je pourrais les connaître un peu, mais c’est très loin du besoin de comprendre. Ils vous doivent peut-être une explication. Ça, ils se débrouilleront sans moi. Eux et moi, c’est fini. Extrait de la lettre de Samuel Beckett à Michel Polac en attendant Godot
Un arbre, deux hommes, chapeaux melon et vêtements usés, puis une corde. Ils attendent Godot. Péripéties réduites à leur minimum, une chaussure qui ne s’enlève pas. Le temps s’écoule, la lune se lève, puis le soleil, les feuilles poussent et tombent, des hommes passent, toujours les mêmes.
Savoir si on est au bon endroit, s’il faut continuer à attendre, si Godot viendra. Les mots meublent, questions sans réponses et phrases inachevées. Humour dérisoire et conflits sans nerfs.
Insignifiant ? Bien au contraire. Le langage, libéré du dire, devient son propre événement pour toucher, par sa nudité, à l’impénétrable — au « petit halètement d’un condamné à vivre », écrit Beckett dans L’Innommable.
Paddy Hayter et Vincent Gracieux ont attendu longtemps avant d’aller vers cette pièce à laquelle le théâtre Garonne les avait invités tandis qu’ils montaient leurs tonitruants Shakespeare, baroques en diable. Ils délaissent ici leur chapiteau pour la rectitude du plateau de théâtre, no man’s land évoquant une fin possible. Mais le Footsbarn reste ce qu’il est, et face à l’abîme, il trouve dans les mots le rythme, la poésie et la force humaine : « C’est dans le néant de cette attente que surgissent l’invention, le jeu et les désirs. »
Théâtre Garonne
du mercredi 23 au samedi 26 novembre 2022
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