La Règle du jeu de Jean Renoir
Considéré comme l’un des plus grands films de l’histoire du cinéma et adulé par nombre de cinéastes, La Règle du jeu jouit ainsi d’une réputation intimidante. La réplique « Tout le monde a ses raisons » a marqué les esprits, mais l’on peut ne pas partager l’admiration suscitée par ce film sorti en juillet 1939. En cette même année, un aviateur, André Jurieux, atterrit au Bourget après avoir battu un record de traversée de l’Atlantique. Célébré, le héros est toutefois fort déçu que sa tendre amie, Christine de La Chesnaye, pour les beaux yeux de laquelle il a réalisé l’exploit, ne soit pas là pour l’accueillir. La crainte de confirmer les rumeurs adultérines autour de leur relation a réfréné la jeune femme pendant que son époux, le marquis Robert de La Chesnaye hésite à rompre avec sa maîtresse Geneviève de Marras. Ce petit monde et d’autres personnages, dont Octave ami fidèle d’André et Christine, vont se retrouver sur le domaine luxueux des de La Chesnaye en Sologne pour un week-end de chasse…
Cette « fantaisie dramatique », ainsi que l’annonce le générique, met en scène maîtres et domestiques, grands bourgeois et gens de peu autour d’un vaudeville à tiroirs. A une longue partie de chasse succèdent des péripéties minuscules, mais tapageuses. L’hystérie s’invite, des coups de feu claquent. Le ridicule n’est pas loin.
« Faites cesser cette comédie »
Avec ce pesant exercice de théâtre filmé qui finit par un drame, nous sommes loin de la grâce déchirante d’Une partie de campagne, réalisé par Jean Renoir trois ans plus tôt d’après la nouvelle de Maupassant, dont la brièveté (quarante minutes) n’empêche pas la densité. A l’inverse, les cent-dix minutes de La Règle du jeu paraissent interminables. Des acteurs en font des tonnes (Marcel Dalio, Julien Carette…), d’autres sont saisissants de fadeur. Renoir s’est donné un rôle, ce n’était pas vraiment la peine. « Faites cesser cette comédie », lance à un moment un personnage. On ne saurait mieux dire. Par son statut, La Règle du jeu fait partie des « films qu’il faut avoir vus ». On n’est pas obligé de l’aimer.