Un soir à Chicago, Alice quitte l’appartement de son amant Jason, avec lequel elle vient de se disputer, lorsqu’un inconnu muni d’un couteau l’entraîne dans une ruelle.
La victime se défend et réussit à retourner l’arme contre assaillant. L’homme s’écroule, la gorge tranchée. Affolée, elle aperçoit une voiture de police qu’elle n’ose héler et se réfugie chez Jason.
Quand ceux-ci se rendent dans la ruelle, l’agresseur – qui semblait au mieux très gravement blessé, au pire mort – a disparu ainsi que le couteau… Alice décide de rentrer au domicile familial et de cacher à son mari et à leur grand fils la terrifiante soirée qu’elle a subie. Pour cette universitaire, qui enseigne au département de théologie de sa faculté, mieux vaut mentir que de risquer l’implosion de sa carrière comme de sa famille.
Autour de cette entrée en matière démarrée tambour battant, Jake Hinkson met en scène d’autres personnages dont les voix vont se succéder et conduire le récit d’un chapitre à l’autre.
Parmi eux : Owen Pall, détective privé de petite envergure, haï par la police locale, spécialiste des affaires d’adultères. Cet homme, qui connut une jeunesse aussi éprouvante que chaotique avant d’être pris en main par un vieux détective de Chicago, n’hésite pas à user de chantage afin d’arrondir ses maigres fins de mois. Mais même un cynique n’est à l’abri du remord ni d’un sursaut de morale.
Secrets et mensonges
Sixième livre de Jake Hinkson en traduit en France, Ainsi va le monde, qui vient d’être publié aux éditions Gallmeister (éditeur également des précédents), se révèle au fil de ses 425 pages un jubilatoire jeu de pistes.
Des maffieux croates et entrent dans la partie. Un criminel d’anthologie, qui semble sorti d’un film de David Fincher, tire les ficelles. Outre la malheureuse Alice, une vieille dame affaiblie et innocente apparaît comme victime annoncée. Sauf que le romancier sait surprendre et ménager ses effets.
Ce roman noir sur la manipulation et la domination suggère que nous vivons dans un monde où l’on ne peut plus avoir de secrets. Pas sûr cependant si l’on se réfère à sa chute. Récompensé par plusieurs prix de littérature policière, Hinkson signe un suspense de haut vol et nous offre au passage des manières d’aphorismes tel ce savoureux : « Internet, le cadeau de Dieu aux hommes qui n’ont pas d’amis. » A lire.
Ainsi va le monde – Gallmeister