En plus d’être romancier, l’Allemand Carsten Henn est un amoureux convaincu de la France et, comme par hasard, parmi les multiples cordes tendues à l’arc de son talent, il y a celui de critique gastronomique. Peut-être est-ce dans cette activité qu’il convient de chercher l’origine de son dernier opus : Le Boulanger qui fabriquait des vies heureuses.
L’auteur nous met dans les pas, si l’on peut dire, d’une danseuse, Sofie, à qui il vient d’arriver malheureusement un accident classique dans le métier. Voilà donc la danseuse-étoile tombée et privée de scène, peut-être définitivement.
Puisqu’il faut bien vivre, Sofie se met en quête d’un travail d’intérimaire afin de participer à l’économie du couple qu’elle forme avec Florian, un chorégraphe. Elle saute sur la première annonce venue, celle provenant d’une boulangerie sise dans le village où ils habitent. Clairement, Sofie ne compte pas y passer sa vie.
Ce qu’elle ignore, c’est que le boulanger, Giacomo, cherche quelqu’un pour prendre sa succession.
Et ce dont elle ne se doute vraiment pas, c’est que ce boulanger fabrique des pains à destination précise des clients auxquels il les vend.
Poète à ses heures, chanteur dès qu’il a un pâton entre les mains, Giacomo semble vivre cependant dans un passé douloureux. Entre une vendeuse acariâtre, une dame teckel qui passe son temps lovée contre le fournil, Sofie se demande où elle a mis les pieds.
Petit à petit, la fabrication du pain prend chez elle l’allure d’un chemin de rédemption dans lequel une âme nouvelle va faire son apparition. Carsten Henn est l’auteur du Passeur de livres, un roman qui vient d’être adapté pour le cinéma et qui sortira, en Allemagne, dans quelques semaines.
Souhaitons vivement qu’un distributeur français prenne la relève.
Pour l’heure, nous retrouvons avec ce Boulanger la pâte, si j’ose dire, du premier livre, avec cette simplicité désarmante pétrie de générosité dans une écriture qui finit par nous bouleverser d’émotion.
Ici encore, le roman est une parabole conjuguant l’art d’aimer à celui de faire du pain.
Par la grâce de son talent, l’auteur nous surprend à sentir, en tournant une page, le fumet unique d’une belle miche sortant du four, avoir cette impression de passer délicatement un doigt sur la croûte veloutée et parfaitement dorée ou encore lui faire ressentir tout le moelleux d’une mie parfaitement levée. Un livre qui fait du bien !
« Le Boulanger qui fabriquait des vies heureuses » – XO Éditions