La sortie du second opus du réalisateur israélien Dani Rosenberg percute de plein fouet les événements tragiques qui embrasent depuis le 7 octobre 2023 le Moyen Orient.
Pourtant imaginé il y a plus de dix ans et tourné quelque temps avant l’attentat terroriste du Hamas, le scénario est, en partie, issu d’une expérience vécue par le cinéaste lui-même. Alors qu’il fait son service militaire, Dani Rosenberg décide de prendre un peu l’air en dehors de l’armée.
Réfléchissant aux conséquences de son geste, il retourne derechef à la caserne, personne ne s’étant aperçu de rien. Mais cet épisode libertaire tourne dans sa tête. Et le voici sur grand écran, poussé jusqu’à ses confins.
Shlomi, 18 ans, est engagé avec son unité israélienne dans l’enclave de Gaza. A cours d’un raid, lui qui ne pense qu’à sa chère et tendre Shiri, plaque tout et s’enfuit à toutes jambes vers Tel Aviv pour la retrouver. Démarre alors une odyssée tragi-comique, à la fois burlesque et angoissante. Portant en permanence, ou presque, son fusil-mitrailleur en bandoulière, troquant son habit militaire pour celui d’un touriste imprudent qui lui a confié ses vêtements alors qu’il part se baigner avec sa dulcinée, le voilà tel Ulysse à la recherche de sa Pénélope.
Il court beaucoup Shlomi, il rampe, il fait du vélo. Rien ne l’arrête. Il va retrouver sa bien-aimée, sa famille aussi, sa grand-mère un peu désorientée (la scène est sublime d’émotion !!!). Mais ce qu’il entend à la télévision le sidère. Le voici non pas déserteur (ce qu’il est en fait), mais kidnappé par le Hamas.
Tsahal lance immédiatement de sanglantes représailles contre la Palestine.
Des dizaines de morts sont annoncées. L’innocent battement d’aile amoureux de Shlomi se transforme en bain de sang.
Au travers de cette aventure quasiment picaresque, Dani Rosenberg nous parle de cette jeunesse israélienne assoiffée de liberté, vivant dans une résilience ahurissante, et ce depuis des dizaines d’années, une guerre dont on doute de voir un jour l’issue.
Tourné avec une caméra hallucinante de virtuosité, sur un montage hyper serré et dynamique, ce film nous vaut de découvrir un jeune acteur israélien, Ido Tako, 22 ans à peine, mais d’une intensité ébouriffante. Sombrant dans l’animalité la plus étourdissante, ce qui lui permet de survivre dans ce maelstrom, souple comme une liane et robuste comme un gladiateur, il porte clairement le film sur ses larges épaules, traçant le portrait d’une génération perdue devant un conflit né dans les affres du siècle dernier.