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L’Impasse de Brian De Palma

by Anthony del Puerto

Considéré comme un génie par les uns, comme un maître de l’esbroufe par d’autres, Brian De Palma présente une filmographie a priori insaisissable.

Venu du cinéma expérimental, il a placé nombre de ses films à l’ombre d’Hitchcock (Sœurs de sang, Pulsions, Blow Out…), navigué entre films de commande, projets personnels, gros succès (Phantom of the Paradise, Scarface, Les Incorruptibles, Mission : Impossible), échecs cuisants, sans perdre de vue ses thèmes et son univers visuel : faux-semblants, voyeurisme, mise en abîme, manipulation, effets de miroirs, masques, longs travellings et panoramiques, split-screens, culpabilité, impuissance, gémellité, schizophrénie…

L'Impasse

Dans sa filmographie inégale, certaines œuvres s’imposent par leur évidence et comme la quintessence d’une mise en scène et d’un récit maîtrisés de bout en bout, à l’instar de L’Impasse sorti en 1993. Si les premières images ne laissent guère de doute sur l’issue du film, l’une des prouesses de Brian De Palma va constituer à faire oublier au spectateur ce qu’il lui a déjà donné à voir… On retrouve là le goût de la manipulation, du jeu avec le vrai et le faux cher au cinéaste.

Lignes de fuite

1975 à New York, Carlito Brigante, ancien caïd du trafic d’héroïne, sort de prison après cinq ans de détention grâce à des erreurs de procédure soulevées par son avocat David Kleinfeld. Brigante veut tourner le dos à son passé et mener une vie rangée. Il prend la direction d’une boîte de nuit, mais confronté à une nouvelle génération de voyous et aux problèmes de Kleinfeld (menacé par un ponte de la mafia qui l’accuse de lui avoir volé un million de dollars), Brigante va devoir replonger dans l’illégalité. De cette trame convenue, De Palma tire un film noir élégant et tendu sur la fatalité, la seconde chance et le rêve américain. Nul romantisme dans cette description d’une voyoucratie où la trahison et la cupidité sont les seules règles. Le monde a changé, se désole Carlito Brigante, se découvrant étranger dans son propre pays.

Dix ans après son remake de Scarface, le cinéaste retrouvait Al Pacino qui interprète ici l’antithèse de Tony Montana, mais les germes du nihilisme bling-bling des années 80 sont présents dans ces seventies baignant dans l’hédonisme disco et funk distillé par la bande originale. Au jeu tout en mesure (pour une fois) de Pacino répondent de formidables seconds rôles dont un Sean Penn méconnaissable, Luis Guzman, John Leguizamo, Adrian Pasdar ou Viggo Mortensen. Quant à la mise en scène de De Palma, moins spectaculaire qu’à l’accoutumée mais toujours aussi virtuose, elle épouse le drame du héros, perpétuellement en quête d’une issue, d’une ligne de fuite, à l’image de la somptueuse course-poursuite finale dans la gare centrale de New York.

Christian Authier

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