Fabrice Caro a sans doute signé le roman le plus drôle de cette rentrée littéraire avec Journal d’un scénario (Sygne / Gallimard), mais les précédents romans de celui qui est aussi un éminent auteur de BD sous le nom de Fabcaro, méritent le détour à l’image du Discours sorti en 2018. L’intrigue simplissime réside presque entière dans le titre : le narrateur, Adrien, se voit intimer à l’occasion d’un déjeuner familial de prononcer un discours lors du prochain mariage de sa femme.
Problème : outre la charge liée à cette proposition que l’on ne peut guère refuser, Adrien est obnubilé par sa relation vacillante avec Sonia dont il n’a plus de nouvelles depuis « la pause » qu’elle a imposée au jeune homme.
Pour le plaisir
A travers un personnage banal, Fabrice Caro explore les névroses familiales et amoureuses, c’est-à-dire l’une des matières les mieux partagées depuis au moins la plus haute Antiquité. L’écrivain a le talent de transformer des situations du quotidien en psychodrames comiques assez irrésistibles. Le discours, découpé en brefs chapitres, enchaîne ainsi des scènes (avec l’attente d’un SMS et les brouillons du discours de mariage comme fils rouges) exploitant le sentiment de solitude et d’étrangeté de son antihéros.
On découvrira notamment comment l’achat d’un CD de Claude Barzotti peut virer à la catastrophe et au quiproquo humiliant tandis que les pensées d’Adrien sur l’inévitable chenille ponctuant les soirées de fête éveilleront une empathie chez certains lecteurs : « face à la chenille, nous sommes tous à la même enseigne, nous sommes là pour nous amuser, nous avons l’obligation d’être heureux, véritable machine à broyer les orgueils ». Les considérations sur les paroles de Pour le plaisir d’Herbert Léonard ne sont pas non plus sans pertinence. Roman léger, burlesque avec ce qu’il faut de désenchantement, Le discours est une lecture idéale pour achever l’été en pente douce.
Le discours de Fabrice Caro – Gallimard