Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
Quel scandale ! Le premier long-métrage de Luis Buñuel mit le feu aux poudres. Un véritable coup de pistolet au milieu d’une messe. En décembre 1930, le cinéma parisien qui le projette est attaqué par des ligues d’extrême-droite. Dans la foulée, le préfet de police de Paris interdit L’Âge d’or. L’objet de ce courroux ? Les censeurs voient dans l’œuvre du cinéaste espagnol une inqualifiable offense à la religion catholique, à la morale, aux bonnes mœurs, aux institutions… Il est vrai que Buñuel et son coscénariste Salvador Dalí, qui avaient réalisé l’année précédente le court-métrage Un chien andalou, n’ont ménagé personne. Car si le film est une œuvre de commande (suscitée par les mécènes Charles et Marie-Laure de Noailles) ; le cinéaste a carte blanche de la part des aristocrates amis des avant-gardes de leur époque.
Feu donc que le quartier général. L’église, l’armée, la société bourgeoise et ses conventions, la bienséance sont clouées au pilori au nom de l’amour fou cher aux surréalistes, de la liberté, du désir sans entraves face à tous les ordres sociaux ou moraux.
Œuvre iconoclaste
Le film débute par un pastiche de documentaire scientifique sur des scorpions et s’achève par une référence aux Cent Vingt Journées de Sodome du marquis de Sade au cours de laquelle l’un des libertins ayant participé à l’orgie est le Christ… Entre ces deux épisodes se succèdent des séquences illustrant la folle passion amoureuse ; entre un homme et une femme bravant tous les interdits. Un évêque est défenestré, un père abat son jeune fils d’un coup de fusil dans l’indifférence générale, l’héroïne suce le pied d’une statue de façon très suggestive… Tout n’est que provocation et blasphème, violence et sexualité dans ce collage malmenant la logique narrative.
Comme souvent, la subversion et l’anticonformisme de cette œuvre iconoclaste, souvent très drôle, sont entrées dans le Panthéon du cinéma. Pas sûr cependant que si un nouvel Âge d’or s’en prenait aujourd’hui aux ordres moraux, aux vaches sacrées, aux puritanismes, au politiquement correct de notre époque, il serait mieux reçu qu’en 1930.
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