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« Un peu tard dans la saison » de Jérôme Leroy

by Bruno del Puerto

Personne n’avait vu venir la chose. Comment appeler cela ? Une désertion ? Un sabotage pacifique ? Des gens disparaissent, abandonnent leurs postes, coupent les ponts. Des milliers de personnes – du ministre à la femme de ménage – font ainsi défection. Les autorités ont trouvé un nom de code pour cette étrange épidémie : « l’Éclipse ». Lorsque les « éclipsés » occupent des postes importants, on maquille leur fuite afin de ne pas susciter des vocations alors que le phénomène se répand aussi à l’étranger. Dans Un peu tard dans la saison, nous sommes dans une France au bord de la guerre civile. Le pays est secoué par une révolte sociale et le terrorisme islamiste. Agnès Delvaux, jeune capitaine des services secrets, est notamment en charge de l’Éclipse, mais surveille également  Guillaume Trimbert, écrivain quinquagénaire prêt, à son tour, à lâcher prise.

un peu tard dans la saison de Jérôme Leroy

Dans Un peu tard dans la saison, Jérôme Leroy (Le Cimetière des plaisirs, Monnaie bleue, La Grâce efficace, La Minute prescrite pour l’assaut, Sauf dans les chansons…) met en scène un double romanesque en la personne de Trimbert, ce nostalgique du monde d’avant la technologie et les réseaux sociaux qui ont réussi « ce que n’avaient jamais imaginé dans leurs rêves les plus fous les polices politiques de tous les régimes : des gens qui se fichent eux-mêmes. »

Mélancolique et rêveur

Un peu tard dans la saison est peut-être le texte qui rassemble le mieux les diverses inspirations et sensibilités de l’écrivain : la poésie, le roman de genre, la ballade hussardienne. Entre la fable, le thriller et la méditation désenchantée, le roman invente un présent à peine décalé et un futur proche assez réaliste. Mélancolique et rêveur, Trimbert participe à la « sécession douce » de l’Éclipse, se réfugie dans des provinces du vieux pays, fait des détours par Porto et Lisbonne.

Un monde s’écroule, il ne faut négliger aucun plaisir, surtout ceux que l’on croyait disparus : « Une certaine qualité de silence. Un silence du monde d’avant, un silence qui était le contraire du silence aseptisé, celui des hôtels de chaînes ou même des palaces internationaux. Un silence qui avait à voir avec les après-midis de l’enfance sans les sonneries de portable, sans les cent vingt chaînes de télé en bruit de fond, sans les onomatopées sonores des jeux vidéo. »

Christian Authier

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