Accueil » As Bestas un film de Rodrigo Sorogoyen

As Bestas un film de Rodrigo Sorogoyen

by Bruno del Puerto

Thriller xénophobe

Sur fond de désert rural, le réalisateur espagnol Rodrigo Sorogoyen nous livre un dernier opus qui tient du thriller, du western voire du film d’épouvante.  Un quatuor d’interprètes incroyables donne vie à ce drame brutal qui ne laisse briller qu’une infime lumière.  Pourquoi n’était-il pas en compétition officielle à Cannes cette année ? Il aurait fait des vagues, c’est sûr. Trop certainement…

As Bestas Rodrigo Sorogoyen
© Lucia Faraig

Rodrigo Sorogoyen nous fait suivre Olga et Antoine, deux Français, qui se sont exilés en Galice il y a quelques années pour vivre une autre vie. Ecoresponsables jusqu’au bout des ongles, ils cultivent des légumes, bio évidemment, et les vendent sur le marché local. En plus, ils retapent des masures et les donnent à ceux qui veulent bien revenir peupler la région. Tout irait à peu près bien, malgré la difficulté du couple à s’intégrer au microcosme paysan. Mais voilà, une enquête au sujet de l’implantation d’éoliennes va tout faire basculer. Les ruraux du coin, aveuglés par les pauvres subsides proposés par la compagnie d’électricité, se voient contrés par le refus catégorique des Français. La guerre éclate. D’intimidations verbales en menaces physiques, le ton monte. La peur s’installe dans le quotidien d’Olga et Antoine d’autant que les plus virulents ne sont autres que leurs voisins, les frères Anta : Xan et Loren. Sentant le danger se préciser, Antoine décide de filmer en caméra cachée tous les obstacles qui se présentent. Il va même jusqu’à essayer de déposer plainte. La police ne veut pas l’entendre.  Alors que les frangins bas du casque se mobilisent de plus en plus précisément, l’inéluctable se produit.

As Bestas, Rodrigo Sorogoyen
© Lucia Faraig

 Porté par une caméra virtuose capable de capter les silences, les regards, les cris, en véritable scanner d’un psychodrame d’une incroyable densité, ce film repose également sur les épaules d’un quatuor d’ores et déjà inoubliable. Les frères Anta, Diego Anido (Loren) et Luis Zahera, terrifiant Xan, parviennent à tétaniser l’image dès leur apparition à l’écran.  Denis Menochet (Antoine), revenu de son peu crédible Peter von Kant, impose à nouveau tout son talent dans ce mastodonte calmant comme il le peut tout ce que les humiliations qu’il encaisse pourraient lui suggérer de ripostes.  Inoubliable ! Marina Foïs bascule dans la seconde partie du film vers un portrait féminin d’une puissance rare.

A voir absolument !

Robert Pénavayre

Articles récents